Quand bébé fera t-il ses nuits ? C’est en tant que spécialiste du sommeil des enfants que j’apporte ici des réponses, notamment en revenant sur certaines croyances que les parents peuvent avoir autour du sommeil des tout-petits. Déjouer ces croyances, c’est déjà mieux comprendre ce qui peut favoriser l’apaisement et donc l’endormissement.

Croyance 1 : bébé fera ses nuits vers 6 mois

Déjà, le mythe de “dormir toute la nuit” peut nous empêche de poser une question importante : “De quoi les bébés ont-ils réellement besoin dans leurs premiers mois de vie ?” Il n’est pas dans l’intérêt du jeune bébé de dormir profondément et toute la nuit. Un bébé qui dort beaucoup trop dans ses premières heures de vie, c’est ce que j’appelle « Un Red Flag ». Je m’interroge alors toujours : le bébé dispose t-il d’énergie suffisante pour se réveiller et entrer en interaction avec son ou ses parents ?

Ensuite, élucidons ce que signifie vraiment « faire ses nuits ». « Faire ses nuits » signifie en réalité enchaîner 6 heures de sommeil d’affilée…Et pas toujours aux heures préférées des jeunes parents, c’est vrai.

Alors, voici quelques informations à avoir en tête :

  • Entre 0 et 4 ans, plusieurs réveils sont possibles la nuit
  • L’hypothèse courante selon laquelle un bébé fera ses nuits au plus tard à 6 mois ne correspond pas à la réalité
  • Le développement du sommeil pas linéaire : poussées de développement, poussées dentaires, petits problèmes de santé, journées particulièrement intenses…Tout cela peut générer des appels la nuit. Y répondre rassure le bébé et continue de lui faire ressentir que ses parents sont présents pour lui.
  • La qualité et la durée du sommeil d’un enfant la nuit repose sur plusieurs facteurs : maturation cérébrale, patrimoine génétique, tempérament, son quotidien, ses habitudes de sommeil…
  • Avant 5 mois, il est physiologiquement normal qu’un bébé se réveille la nuit pour boire ou être câliné. Un bébé en santé qui évolue bien fera ses nuits entre 6 et 18 mois, c’est-à-dire qu’il parviendra à ce moment là et régulièrement à enchaîner de lui-même plusieurs cycles et dormir 6 à 8h sans intervention parentale.
  • La présence et les interactions parentales positives pendant les premières années de vie sont profitables au jeune enfant.

Croyance 2 : un enfant allaité fera moins rapidement ses nuits

On me pose souvent la question suivante « Si bébé est allaité, est-ce différent ? Quand fera t-il ses nuits ? ». Aucune étude ne montre que les bébés allaités font moins rapidement leur nuit. La durée de sommeil d’un bébé allaité dépend de multiples facteurs : l’absence de perturbateurs d’endormissement et/ou de ré-endormissement, la lactation de la maman, son état de fatigue, sa production de lait, sa capacité de réserve, les capacités du bébé à s’auto-réguler, la mise en place de l’allaitement à l’amiable en journée, le tempérament du bébé…La capacité d’un bébé non allaité à enchaîner ses cycles de sommeil dépendra également de multiples facteurs, dont certains sont communs à ceux des bébés allaités.

L’obsession autour d’une « nuit complète » pousse parfois à tort au “sevrage nocturne” du bébé voir à l’arrêt de l’allaitement. Dans ce contexte, la durée du sommeil d’un bébé est parfois utilisée pour savoir si le bébé reçoit suffisamment de lait maternel ou s’il existerait, au contraire, une lactation insuffisante. Cette perception-là réduit malheureusement l’allaitement à sa seule dimension nutritive et présente implicitement bébé comme un tube digestif. Le sevrage nocturne n’implique pas forcément l’arrêt des appels la nuit.

Croyance 3 : la veilleuse aide bébé à s’apaiser

Chaque enfant est unique mais ce qu’il faut savoir c’est qu’un faible éclairage favorise la sécrétion de la mélatonine, l’hormone du sommeil. Et ce n’est pas tout ! La température corporelle, le niveau de cortisol du parent, sa capacité à repérer les signes de fatigue, les rituels d’endormissement…Beaucoup d’autres choses favorise (ou pas) l’apaisement de l’enfant et donc sa réceptivité à entrer dans le sommeil.

Croyance 4 : la méthode 5/10/15 peut aider bébé à faire ses nuits

C’est vraiment une croyance à défaire ! Ce n’est pas parce que ça semble fonctionner (l’enfant finit par s’endormir) que c’est juste pour l’enfant. Déjà, bien souvent, l’enfant s’endort d’épuisement puisque le cortisol, l’hormone du stress, ne peut monter en permanence. Ensuite, dans cette situation, l’enfant est laissé seul alors qu’il a besoin pour son développement affectif d’être soutenu. C’est le « parent phare » ou la personne présente qui le soutient et l’aide à comprendre ce qu’il vit. Ces méthodes ont tendance à “robotiser” le parent et à le couper des émotions que peut ressentir son enfant. Le parent pourrait alors penser, à tord, que l’enfant a besoin d’expérimenter plusieurs courtes expériences de pleurs en étant seul pour s’apaiser et parvenir au sommeil. Il vaudrait mieux dire au parent à bout qu’il a le droit de ne plus supporter les cris et que prendre un temps de pause, après l’avoir exprimé à l’enfant, est parfois nécessaire pour éviter tout geste brusque potentiellement délétère pour son enfant. Avec ce type de méthode, le parent se concentre malheureusement plus sur le timing que sur la connexion à son enfant. Plutôt que de promouvoir ce type de méthodes, j’accompagne le ou les parents à travailler sur leur posture d’assurance, de guide du sommeil et à accueillir les émotions de leur enfant. C’est plus complexe bien sûr mais…C’est plus juste. A noter aussi que la méthode 5/10/15 peut être particulièrement désastreuse pour les enfants qui présentent des perturbateurs d’endormissement. Pour en savoir plus à ce sujet, je vous invite à lire mon interview sur My Lizy.

Croyance 5 : les régressions sont liées à des pics de croissance

Dans les phases de stabilité, le bébé consolide ses derniers acquis puis il vit une phase de déstabilisation, suivie d’une phase d’acquisition et d’expérimentation. La phase de déstabilisation est inconfortable pour lui : ses anciens modes de fonctionnement et de perception sont modifiés, rendant notamment son sommeil plus fragile et ses éveils plus agités. Demander souvent les bras et la tétée fait partie de ses façons de s’apaiser, surtout dans les premiers mois. Il ne s’agit nullement de caprices comme on pourrait l’entendre mais de “phases crampons”. Ces phases se passent mieux quand ses parents les comprennent et les accompagnent. Ces épisodes sont souvent appelés « pics de croissance » suggérant que le bébé en grandissant a besoin de plus de lait maternel. Le phénomène n’est pas du tout de l’ordre du digestif, vous l’avez bien compris.

Les poussées de croissance, elles, sont des périodes de quelques jours, de croissance particulièrement rapide en taille, avec un bébé qui dort plus que d’habitude
(l’hormone de croissance est délivrée dans le sommeil), et qui ne demande pas forcément le sein plus souvent puisqu’il dort beaucoup.

Si votre enfant semble présenter des difficultés liées à son sommeil, vous pouvez réserver un appel gratuit ou une consultation directement depuis mon site web. Si vous souhaitez en savoir plus sur le sommeil de l’enfant, vous pouvez trouver quelques ressources intéressantes sur la physiologie du sommeil sur le site de Morphée. Pour une meilleure compréhension sur « les trains du sommeil », je vous invite à consulter le site de Calmosine.

Photo de Carlo Navarro sur Unsplash